Marie-Castille Mention-Schaar (2023) France 1h55 Avec: Oulaya Amamra, Lina El Arabi, Niels Arestrup
À 17 ans, Zahia Ziouani rêve de devenir cheffe d’orchestre. Avec sa sœur jumelle, Fettouma, violoncelliste elles souhaitent rendre accessible la musique classique à tous et dans tous les territoires. Mais en 1995 quand on est une femme, d’origine algérienne et qu’on vient de Seine-Saint-Denis ? Ce n’est pas simple
D’après une histoire vraie un film dépourvue de fausses notes

Que diriez-vous d’un film chaleureux, radieux, pour lutter contre les frimas de l’hiver, les jours trop courts ? Tel est ce Divertimento de Marie-Castille Mention-Shaar, qui vise juste et vient percuter sans rechigner la réalité. Divertimento joue avec les préjugés, les malmène et c’est salutaire, intelligent sans oublier d’être pêchu, drôle et offensif. Car, nourrie par les injustices séculaires, la révolte gronde sous la jovialité inaltérable des deux jeunes protagonistes. Tête haute, fortes de cette dignité de ne pas se laisser aller à répondre à la bassesse par la bassesse, c’est avec une grande élégance, la force de leur jeune âge que les sœurs Ziouani, Zahia et Fettouma, se battront avec grâce, non contre les autres, mais contre leur bêtise, ce synonyme de la paresse, disait Jacques Brel : « cette graisse que l’on a dans le cœur ». Utopia
Selon les sources, il n’y a, dans le monde, que 4 à 6% de femmes à la tête d’un orchestre symphonique. Autant dire que si, à 17 ans, vous rêvez de devenir cheffe d’orchestre, vous devez vous attendre à rencontrer pas mal de difficultés. Si, en plus, vous venez du 93 et que votre famille a ses origines en Algérie, on peut penser qu’il faut un optimisme démesuré pour continuer sans cesse à croire possible la réalisation d’un tel rêve. Et pourtant … Et pourtant, à force de volonté et de talent, Zahia Ziouani y est arrivé et c’est son cheminement vers ce Graal que raconte Divertimento……
Il est probable que certain.e.s, critiques compris, vont renâcler face à ce très beau film, l’accusant de trop faire appel aux bons sentiments. Dommage pour eux/elles si elles et ils se montrent incapables d’être touché.e.s par le plaisir et l’émotion ! En tout cas, cette émotion qu’il parait normal de ressentir face au combat, finalement victorieux, mené par Zahia et Fettouma Ziouani, elle se trouve renforcée par les musiques retenues pour le film, comme la Bacchanale de l’opéra Samson et Delilah de Camille Saint-Saëns ou le boléro de Maurice Ravel. Jean Jacques Corrio

La réalisatrice
Marie-Castille Mention-Schaar est une réalisatrice, productrice, scénariste et ancienne journaliste française
Après des études de journalisme[5], Marie-Castille Mention-Schaar part à Los Angeles où elle devient journaliste pour le Hollywood Reporter[6]. Après avoir vécu douze ans aux États-Unis, elle revient en France et débute dans l’industrie cinématographique en tant qu’assistante de production.
En 2012, elle réalise son premier film. Elle s’inspire de sa première grande histoire d’amour, pour écrire ce qui deviendra Ma première fois, film se voulant comme un hommage au père de sa fille, aujourd’hui décédé. La même année sort en salles Bowling, avec Catherine Frot, Mathilde Seigner . Cette comédie sociale est inspirée d’un fait divers français de 2008 où tous les habitants de Carhaix ont manifesté pendant 17 semaines afin d’empêcher la fermeture du service de maternité de leur hôpital.
En 2016, elle tourne Le ciel attendra sur un sujet plus délicat, celui du départ de jeunes femmes pour la Syrie par embrigadement, et séduction amoureuse. Divertimento est son huitième film, le suivant « Pour le pire et le meilleur » sortira en 2026
L’interview
Parlez-nous du choix des morceaux interprétés.
« La Bacchanale » de Camille Saint-Saëns s’imposait : c’est LE morceau de Divertimento, un morceau que j’aime d’ailleurs beaucoup. Ma priorité a ensuite été de sélectionner des œuvres susceptibles d’aller chercher et trouver le public, de l’attraper : il ne fallait surtout pas créer de rejet, ce que certaines œuvres peuvent provoquer chez les personnes qui ne sont pas mélomanes. Donc forcément, « Le Boléro » de Ravel et puis Schubert, Prokofiev… J’ai évidemment eu des discussions avec Zahia. Le projet était vraiment de choisir des œuvres qui correspondent au film et, je l’espère, à un film grand public.
Il y a dans DIVERTIMENTO des scènes très belles où l’on comprend à quel point chaque bruit – un cri d’oiseau, un bruissement dans les arbres, jusqu’au passage d’un train – déclenche chez Zahia un élan vers la musique…
Pour elle, la vie, c‘est la musique, et la musique, c’est la vie. Quand Zahia lit ses partitions sous la couverture, quand elle dirige un
orchestre imaginaire sur le toit de son immeuble, quand elle entend une sirène ou des voitures passer sur un pont, les bruits, les sons se transforment en musique. Je voulais que le spectateur ressente ça, à travers les images, le montage son…
DIVERTIMENTO offre un regard sur les femmes que l’on voit moins aujourd’hui : elles sont résolues, battantes, mais jamais hostiles…
J’ai été féministe dans mes films dès BOWLING où je voulais mettre en lumière toutes celles qui s’étaient battues contre la fermeture de leur maternité à Carhaix. Les femmes, je les défends aussi depuis des années à travers « Le Cercle féminin du cinéma français » que j’ai fondé avec d’autres professionnelles du cinéma pour nous permettre de nous rencontrer, d’échanger, de trouver des solutions, de transmettre et de construire pour la première fois en France un réseau féminin dans un secteur jusqu’alors uniquement masculin. J’ai beaucoup de mal avec la violence qui régit de plus en plus les rapports entre les deux sexes. Pour moi, le féminisme doit être constructif ; positif. C’est ce que raconte aussi DIVERTIMENTO.