Walter Salles (1998) Brésil 1h53 Avec: Fernanda Montenegro, Vinicius de Oliveira, Marília Pêra
Dora, gagne sa vie en écrivant des lettres pour les migrants illettrés à la gare centrale de Rio. Ana et son jeune fils Josue font appel à ses services pour retrouver le père de l’enfant.
Une peinture superbe du Nordeste
Ce qu’il est intéressant de remarquer, c’est que Central do Brasil va à contre-courant de ce fameux Cinema Novo qui, lui, montrait la souffrance des paysans du Nordeste et les mouvements migratoires vers les zones urbaines du Sud ou du littoral. Une bonne trentaine d’années plus tard, les esprits ont changé et les espoirs de fortune sont venus s’échouer sur les brisées d’un réalisme économique sauvage. Toutefois, si le sort des Nordestins n’est guère plus enviable aujourd’hui, le fait est qu’ils ont su se préserver de l’égarement identitaire qui frappe une majorité de citadins comme nous le répète à l’envie le film de Salles. Philippe Leclerq
À travers ce drôle de couple en quête d’identité […], Walter Salles filme une sorte de road-movie qui nous emmène de la gare de Rio, vibrant d’une population toujours en mouvement, jusqu’à des villages reculés où le temps semble s’être arrêté. Un long parcours en car, en stop et à pied, durant lequel le réalisateur tente de rapprocher ces deux êtres qui, au départ, n’ont rien en commun, sinon leur solitude. Pavé de bonnes intentions, parfois même un peu larmoyant (mais jamais misérabiliste), le film contient néanmoins une authentique charge émotionnelle, qui doit beaucoup à la qualité de son interprétation. ” Christophe d’Yvoire, Studio
Entre la femme et l’enfant], insensiblement, comme une ombre, une complicité affective va apparaître dans le sillage de l’entente obligée. Et c’est là que l’intelligence du metteur en scène acquiert une dimension rarement atteinte. Il risquait de tomber dans le mélo. Mais il ne fait que suggérer la métamorphose des choses au fil de cent péripéties qui jalonnent le voyage. Simplement parce que les gestes deviennent moins brusques, les regards plus confiants. L’art de Salles est fondamentalement impressionniste ; il enchaîne les accords, les dissonances, les allusions troubles ou fluides, les arpèges brisés. L’effet est bouleversant. ” Le Figaro,
Le réalisateur
Walter Salles est né à Rio de Janeiro, en 1956, dans le quartier de Botafogo celui de l’équipe de Garrincha et Jairzinho. pour les amateurs de foot. En 1974. Découverte de Mémoires du sous-développement, de Tomas Gutierrez Alea, et de Profession : reporter d’Antonioni. Ce sont ces deux films, puis Vidas Secas, de Nelson Pereira dos Santos, qui l’amènent au cinéma.
1984. La télévision brésilienne s’ouvre à la production indépendante après la fin de la dictature militaire. Il réalise ses premiers documentaires avec des écrivains (Borges, Garcia Marquez) et des cinéastes (Akira Kurosawa).
En 1994 tournage en trois jours de Socorro Nobre, documentaire sur la relation épistolaire entre un sculpteur polonais exilé au Brésil, Franz Krajcberg, et Socorro, une femme en prison dans l’Etat de Bahia. Ce documentaire est à la base de Central do Brasil (1998) qui gagne l’ours d’or à Berlin. Auparavant en 1995 il réalise Terre lointaine, long métrage réalisé avec Daniela Thomas. L’exil des Brésiliens sous le gouvernement chaotique de Collor.
En 2000 il devient producteur de films de jeunes réalisateurs brésiliens, et de documentaires de metteurs en scène confirmés. Carnets de voyage (2003) est inspiré des livres d’Ernesto « Che » Guevara et Alberto Granado Cinq ans furent nécessaires pour décanter le projet de ce film. Entre-temps, il adapte Avril brisé, d’Ismail Kadaré, et en 2012 « Sur la route » de Jack Kerouac . Son dernier opus en 2024 a pour titre « Je suis toujours là » sur la disparition d’un député du parti travailliste durant la dictature début des années 70
l’Interview
Comment évaluez-vous l’importance de ce film dans votre carrière ?
Central do Brasil a été conçu dans les derniers mois du mauvais gouvernement de Collor. Après donc plusieurs années de silence forcé dans le cinéma brésilien. Dans Central, la recherche du père est la recherche d’un pays possible, après des années si traumatisantes de notre vie.