Iciar Bollain (2004) Espagne 1h 49 Avec Laia Marull, Luis Tosar, Candela Peña
Pilar, s’enfuit de chez elle en emmenant son fils. Son mari, violent la poursuit, veut la ramener à la maison….
Un film intimiste, tout en finesse: poignant

Ne dis rien (Tey doy mis ojos) aborde avec intelligence, sans verser dans le pathos et la facilité, le thème délicat de la violence conjugale. Avec une grande empathie à l’égard d’un couple à la vie ordinaire, coincé dans cet engrenage, la réalisatrice invente une descente bouleversante au coeur de l’amour blessé, rudoyé, humilié……., la réalisatrice évite de porter un jugement sur le mari violent. Cette rage intérieure, prête à exploser à la moindre contrariété, il est le premier à vouloir s’en guérir. Mais le peut-il vraiment?
Iciar Bollain expose de façon brutale la traversée du désert de ces deux personnages meurtris, qui tentent tant bien que mal de recoller les morceaux d’un amour qui tient à bien peu, sinon au passé. Son drame coule de source, entre malaise, brutalité et espoirs déçus. Laia Marull, en épouse meurtrie mais courageuse, et Luis Tosar, en mari bombe à retardement, confèrent à ce film une troublante authenticité Normand Provencher
Le film de Iciar Bollain est une chronique résolument amère sur les liens affectifs et la violence conjugale. Il est l’occasion de deux portraits croisés. Celui d’une femme terrorisée, qui, dans un ultime sursaut de dignité, tente de s’émanciper de l’emprise de ce mari qui la bouleverse, mais qui ne lui laisse aucune marge de manœuvre, de liberté. Celui également, d’un homme au comportement d’apparence moins machiste que les autres, que l’amour et la peur de perdre l’autre mènent à un besoin de possession Abus de ciné
Icíar Bollaín
a débuté sa carrière dans le cinéma, en tant qu’actrice, dans le film de Victor Erice, El Sur (1983) à l’âge de 16 ans. Mais c’est sans aucun doute à partir de sa rencontre avec Ken Loach, lors de sa collaboration au film Land and Freedom / Tierra y Libertad, en tant qu’actrice et assistante du réalisateur qu’elle va donner une place prépondérante à la réalisation. Ken Loach et elle partagent la même volonté de donner la parole à ceux que l’on veut faire taire et de lutter contre l’injustice sociale à travers leur œuvre, de film en film. Elle est la compagne du scénariste de Ken Loach, Paul Laverty . Ensemble, on leur doit Ne dis rien en 2003, sur une femme battue, Même la pluie en 2010,programmé lors de la saison 2024-2025 du ciné-club , L’olivier en 2016. Yulli en 2018 projeté lors des Automnales 2022, Le Mariage de Rosa (2020) Les Repentis (2022): un dialogue entre un ancien terroriste de l’ETA et la veuve de l’une de ses victimes, inspiré par des faits réels et son dernier opus en 2024 « L’affaire Nevenka » à partir de faits réels le harcèlement sexuel subit par une conseillère municipale
Paroles de la réalisatrice
« Les femmes ont toujours été au cœur de mes histoires. Bien avant MeToo, je racontais Ne dis rien (2003) qui est un cas d’abus. Le mouvement ne m’a donc pas affectée dans mon travail mais il a réveillé la conscience de l’usage du pouvoir sur le lieu de travail. C’est quelque chose que vous pouvez sentir dans notre industrie. Je n’en ai pas souffert personnellement mais je l’ai senti. J’ai commencé ma carrière en tant qu’actrice et je dois dire que j’ai fait deux essais avec un directeur de casting américain qui, à chaque fin de scène, me donnait une fessée. Sur le moment, c’est fou à quel point vous acceptez et à quel point c’était normalisé. Je n’ai pas aimé ce moment, je m’en souviens. Ce n’est pas allé plus loin mais je me disais que je n’aimais pas ça. Quand MeToo est arrivé, je me suis dit qu’il était important que ça sorte. C’est MeToo et maintenant c’est l’horrible affaire de Gisèle Pelicot. «
« Je te donne mes yeux, (traduction du titre original), raconte l’histoire de Pilar et Antonio mais aussi de ceux qui les entourent, une mère qui consent, une sœur qui ne comprend pas, un fils qui regarde et se tait, des amis, une société et une ville comme Tolède, cela ajoute avec sa splendeur artistique et son poids historique et religieux une dimension de plus à cette histoire d’amour, de peur, de contrôle et de pouvoir. »