DK Welchman, Hugh Welchman (2024) Pologne 1h55 Avec: Kamila Urzedowska, Nadia Tereszkiewicz adaptation de « Les Paysans », du romancier polonais Wladyslaw Reymont, Prix Nobel de littérature en1924
Au XIXe siècle, dans un village polonais en ébullition, la jeune Jagna, promise à un riche propriétaire terrien, se révolte. Elle prend son destin en main, rejette les traditions
Un bijou cette fresque naturaliste au rythme des saisons.

Adaptation d’un roman de mille pages, La Jeune fille et les paysans trouve place aux côtés de L’Arbre aux sabots (Ermanno Olmi, 1978) ou de Tess (Roman Polanski, 1979), dans leur description du monde rurale au XIXe siècle en mutation, avec un discours féministe très contemporain. Sous le jour d’une fable classique, dont la mise en image est un mélange de tradition et de modernité, La Jeune Fille et les paysans participe d’une poésie au service d’une cause sociétale d’actualité.
Les réalisateurs du sublime « La Passion Van Gogh », film d’animation à base de peintures animées, en forme d’enquête sur la mort du peintre, étaient forcément attendu au tournant. « La Jeune fille et les paysans » est leur nouveau long métrage, lui aussi en animation, à base de prises de vues réelles reprises aussi à la façon de peintures, et incorporant des tableaux connus de peintres polonais de la fin du 19e et début du 20e siècles (Józef Chełmonski, Michał Gorstkin-Wywiórskik, Ferdynand Ruszczyc…). En résulte un tourbillon de couleurs qui, comme le livre fleuve, prend la peine, au fil des saisons, de saisir les détails de la campagne polonaise (paysages multiples, mouvements des animaux de ferme, charrette surchargée de choux que l’on pousse sous la pluie, richesse des étales du marché…) ou l’ivresse des fêtes locales. Olivier Bachelard
Car dans cette Pologne rurale très catholique et conservatrice, il va de soi que ce n’est pas à l’homme adultère qu’on en veut mais à celle dont la beauté et la soif de liberté offense le cours « naturel » des choses. Et la violence de la réaction des habitants sera à la hauteur de leur étroitesse d’esprit. Très beau plaidoyer contre le patriarcat et les violences faites aux femmes et pour la liberté individuelle, La Jeune fille et les paysans est évidemment sublimé par le travail plastique incroyable de l’équipe de réalisation qui, dans ce récit chapitré en quatre parties comme les quatre saisons qui rythment la vie des champs, magnifie la beauté picturale des paysages et des traditions polonaises, utopia
Qu’est-ce que la rotoscopie ?

L’animation par rotoscopie est le processus de création de séquences animées en dessinant image par image sur des prises de vue en direct. Bien qu’elle soit chronophage, la rotoscopie permet aux animateurs de créer des personnages réalistes dont les mouvements sont similaires à ceux des personnes dans le monde réel.
En 1915, l’animateur Max Fleischer a breveté le premier rotoscope. Il a utilisé cette technique d’animation pour réaliser la série de courts-métrages Out of the Inkwell, qui a rendu célèbre le personnage de clown de son frère (Koko le Clown). Max Fleischer a ensuite créé d’autres personnages animés célèbres, dont Popeye et Betty Boop.
Lorsque le brevet de Max Fleischer a expiré, Walt Disney a utilisé sa technique de rotoscopie. Les acteurs jouaient les scènes puis, à partir de ce métrage, leurs mouvements étaient rotoscopés pour servir de référence dans de nombreux films, à commencer par Blanche-Neige et les Sept Nains.
La rotoscopie est une technique largement utilisée, que ce soit pour créer des versions entièrement animées de métrages vidéo ou pour placer des caches sur des vidéos afin de transformer de vrais acteurs en créatures fantastiques ou des versions plus jeunes d’eux-mêmes.
Les réalisateurs
Hugh WELCHMAN

Diplômé d’Oxford en philosophie, politique et économie, Il gagne sa vie en enseignant l’histoire et en vendant des tapis – et même des poissons ! – mais il participait au même moment à des projets collectifs cinématographiques à Londres. Après quelques expériences catastrophiques, il s’est formé à la National Film & Television School. Il entame son parcours professionnel en produisant des courts métrages pour les Monty Python .
En 2008, il obtient l’Oscar pour PIERRE ET LE LOUP. Présenté au Royal Albert Hall avec un accompagnement concert du Philharmonic Orchestra, PIERRE ET LE LOUP est monté au Hollywood Bowl et dans 70 salles de concert du monde entier. Il produit ensuite MAGIC PIANO & THE CHOPIN SHORTS, présenté à la Cité Interdite de Pékin, au Lincoln Center de New York et dans une trentaine d’autres salles de concert avec un accompagnement au piano.
Après être tombé amoureux de Dorota Kobiela, il s’est aussi pris de passion pour son projet, LA PASSION VAN GOGH, qu’il a coréalisé et produit.
DK Welchman née Dorota Kobiela
Diplômée de l’Académie des Beaux-Arts de Varsovie, . Après avoir découvert le cinéma et le cinéma d’animation , elle se lance dans ces nouvelles disciplines artistiques et intègre l’École de cinéma de Varsovie. Dès 2004, Dorota Kobiela réalise ses premiers courts métrages d’animation . En 2011, Little Postman est le premier film d’animation au monde, à sa connaissance seulement, à utiliser la peinture stéréoscopique. Il remporte de nombreux prix.
Sorti en octobre 2017, La Passion Van Gogh relate les derniers jours et la mort énigmatique du peintre néerlandais Vincent van Gogh4. Elle s’entoure du co-réalisateur Hugh Welchman qu’elle épouse. Pendant près de deux années, à partir des séquences filmées et adaptées de 800 lettres manuscrites du peintre, les artistes ont peint à l’huile chaque plan sur des grandes toiles.
L’interview
Votre version de l’histoire est bien plus féministe que le roman de Reymont. C’était votre intention dès le départ ?
HW : Dans le roman, on sent que la vie de villageoise moyenne ne lui suffit pas. C’est cette idée-là que nous voulions développer. Nous voulions montrer que la vie de toutes les femmes est déterminée par leur place dans la hiérarchie sociale, et aborder
ça de façon moderne.
Jagna est le personnage le plus marquant du roman, mais ce dernier raconte l’histoire de toute une communauté. Nous, nous voulions vraiment centrer notre récit sur sa volonté de vivre à sa manière. Elle ne se soucie pas des choses matérielles, contrairement à tous ceux qui l’entourent, qui ne pensent qu’à posséder des terres et des biens.
C’est un film très musical, rempli de chansons et de danse. Pour quelle raison ?
DKW : C’est vrai qu’étonnement, c’est très musical. Lorsqu’on écrivait le scénario, on a été très inspirés par les descriptions des nombreuses fêtes, du mariage de Boryna et Jagna au cours duquel les invités boivent et dansent pendant trois jours d’affilée.
Ce sont des gens qui mènent une existence dure, qui travaillent du soir au matin mais qui savent aussi célébrer le cycle de la vie. Ils aiment les vêtements, la musique, et ils adorent danser.