Marie Garel-Weiss (2023) France 1h31 Avec Daphne Patakia, Benoît Poelvoorde, Agnès Jaoui, Raphaël Quenard
Sortie d’hôpital psychiatrique, Mimi après maintes péripéties devient assistante dans un cabinet d’avocats. Farfelue elle est chargée de récupérer des dossiers chez un ancien associé du cabinet en pleine déprime: un attelage explosif et décapant.
Souvent très drôle, et par endroits émouvante, une comédie réussie.

Derrière le comique des situations, la réalisatrice laisse constamment affleurer sa tendresse pour des personnages aux failles parfois vertigineuses, constamment sur le fil comme des oiseaux «sur la branche». Dans la lignée de son précédent film, La Fête est finie, qui mettait en scène le combat touchant de deux jeunes filles contre leur addiction, elle dresse le portrait de marginaux qui tracent leur route hors des clous et des normes, même s’ils finissent, comme Mimi, par être rattrapés au détour d’une route de campagne.
On suit avec plaisir l’échappée en solitaire, des rues de Paris au littoral breton, de ces deux héros au cœur
pur en quête de liberté. Céline Rouden
Cette structure autour d’une rencontre qui ne laisse, d’abord, présager rien de bon, pourrait donner des airs de déjà-vu ; et pourtant, il devient vite évident que sous cette incompatibilité présumée, il existe un langage commun, que le film va s’essayer à dénouer.
La comédie, très présente, surgit alors de l’appréciation et de la compréhension souvent contradictoires qu’a chacun des personnages d’une même situation. Difficile de ne pas succomber au charme de Sur la branche, ne serait-ce que par son aisance à brosser en quelques traits ses personnages, et en faisant se côtoyer des visages connus (Benoit Poelvoorde et Agnès Jaoui) et d’autres plus émergents (Daphné Patakia et Raphaël Quenard), tous impeccables. Le film réussit à faire de son héroïne, à l’intuition presque magique, un beau personnage. Valentina Verhague
La réalisatrice
Marie Garel-Weiss est une scénariste et réalisatrice française. Elle commence par être stagiaire puis assistante réalisation sur des tournages. Avec Vincent RAVALEC, elle écrit deux courts métrages qu’elle réalise en quelques heures et sans moyens. Elle collabore aussi à plusieurs programmes courts pour la télévision et réalise en 2021 pour ARTE « Qu’est ce qu’on va faire de Jacques ». Elle a travaillé en tant que coscénariste avec différents réalisateurs comme Fabrice du WELZ ou Cédric KAHN ainsi qu’Hélène ANGEL (Propriété interdite (2010)). Elle a également adapté Jeunesse sans Dieu de Odon von Örvath au théâtre de la Bastille, mise en scène par François ORSONI.
La Fête est finie (2017) qui mettait en scène le combat touchant de deux jeunes filles contre leur addiction, était son premier long métrage avant donc « Sur la branche »
L’interview de Marie Garel-Weiss
Comme dans votre premier long-métrage, La fête est finie, et votre film pour Arte, Qu’est-ce qu’on va faire de
Jacques ?, vos personnages naviguent en marge de la société, entre enfermement et liberté. D’où vous vient ce
goût pour les outsiders et les duos ?
Cela rejoint sans doute mon sentiment que tout le monde finalement avance en dehors des clous, tout le monde se
sent « à part ». Mais en ce qui concerne les pathologies, les troubles, que ce soit chez les schizophrènes, les bipolaires,
les dyslexiques ou tout autre profil que la société accueille difficilement ou pas du tout, je suis fascinée par leurs
capacités compensatoires hors du commun, que je considère comme des dons.
Comment est née Mimi, dont le caractère sans filtre, les facultés hors norme et l’inaptitude sociale lui confèrent des airs de super-héroïne ?
À la différence de La fête est finie, qui témoignait de ma propre expérience, j’avais envie avec Sur la branche d’aller vers la pure fiction, dans ce qu’elle autorise de jubilatoire et d’inventif. Avec mes scénaristes, nous avons voulu créer des personnages au sens plein du terme, et Mimi en est un. Le temps d’un film, elle va au bout de ses obsessions et est totalement acceptée pour ce qu’elle est, alors que dans la vie, elle serait sans doute vouée à être enfermée ou, du moins, contrôlée. C’était une gageure de faire exister Mimi sans qu’elle soit attendrissante, ou « mignonne » ; de la rendre à part tout en étant incarnée ; de la faire interagir avec les autres, qui, eux, sont plus soumis au réel. Mimi n’a pas vraiment d’ancrage, elle a compris qu’elle n’y arriverait pas de la même façon que les autres. Elle a soif d’absolu, de justice, ce qui n’est pas forcément vertueux, mais révèle une grande angoisse de la vie !
Votre film se situe au carrefour de plusieurs genres : on pense au film d’enquête, à la comédie romantique, et même à certaines comédies de l’âge d’or hollywoodien…
J’admire les films de Billy Wilder, et j’ai revu en écrivant La Garçonnière, dans lequel Shirley MacLaine possède ce côté mi-fille mi-garçon qui nous a inspirés. J’aime ces films qui fabriquent de la comédie avec la petite cruauté de la vie et des autres, qui magnifient des personnages aux destins pâles, tout ça dans un écrin hyper simple mais finalement théâtral, car irréel.