Un film de Alexandra Pianelli (2020) 1h16
Paris, un kiosque à journaux. Alexandra est réalisatrice, fille, petite-fille et arrière-petite-fille de kiosquiers. Elle est venue prêter main-forte à sa mère et, comme dans un vieux rêve d’enfant, joue à la marchande. Depuis cette fenêtre sur la rue, elle filme avec humour et tendresse les coulisses du métier et le défilé quotidien de clients détonants. Mais la presse papier et les commerces de proximité sont en crise, et ce petit jeu s’avère finalement plus compliqué que prévu…

Pendant dix ans, la réalisatrice a constaté l’étau qui se resserrait sur ce petit commerce de proximité, qui a pris de plein fouet la crise de la presse et de sa distribution. Sa petite caméra numérique tangue parfois, montrant la fragilité d’un métier considéré comme « essentiel » pendant la crise sanitaire, et qui tisse encore des liens sociaux forts entre les habitants d’un même quartier (La Croix)
Pianelli, par ailleurs plasticienne, fait preuve d’inventivité. Les contraintes du lieu peuvent par exemple être détournées lorsque celui-ci se retrouve dessiné, découpé, ou raconté façon maquette. Humble formellement mais ambitieux humainement, le long métrage parvient à être émouvant, notamment en filmant un lieu du quotidien, un lieu qui a toujours été là, mais qui en est à son crépuscule.
C’est aussi une très bonne comédie avec un drôle de sens du détail. En quoi la chemise d’un client annonce la revue qu’il va acheter ? Sur quelle teinte de parution d’extrême-droite les militants de la Manif pour tous vont-ils se ruer lors de leur cortège ? Derrière ce que le doc peut dire d’un quartier ou de membres d’une famille, il y a aussi un aspect de farce lunaire dans ce lieu où l’on trouve parutions sur du camping-car ou des tracteurs, magazines de cul ou sur les affaires, numéros d’Esprit ou de Télé Star.
Alexandra Pianelli
diplômée des Arts Décoratifs de Strasbourg. elle axe sa pratique autour des notions de travail et de jeu, aime le bricolage et se définit volontiers comme un couteau suisse.
Son travail s’articule à partir d’une quête de l’autre. Celui qu’on n’a pas vu même si on était à côté. Elle part d’une approche documentaire dans laquelle la réalité rejoint la fiction et s’efforce, sous la forme d’un jeu, de mettre en contact des niveaux de réalité tenus éloignés les uns des autres.
Elle réalise depuis quelques années des films sur son lieu de travail (des jobs alimentaires) où on la voit doublement « à l’œuvre », «en train» de faire: réaliser un film à partir d’un job alimentaire (ou inversement : choisir un job alimentaire en vue d’un film à faire) lui permet, en tant qu’artiste, de ne plus se diviser entre recherche de moyens pour vivre et temps de création.