(2020) Etats Unis 1h 29 De Annabelle Attanasio Avec Camila Morrone, James Badge Dale, Calvin Demba
Mickey Peck, une adolescente du Montana, a la lourde responsabilité de s’occuper de son père, un vétéran de la guerre en Irak, accro aux opiacés.

Mickey quasi jeune femme sur un terroir machiste, patriarcal, ficelée, ligotée par trop de rôles à assumer : fille, mère, docteur…. de son père, et enfermée dans des rapports que duels avec des garçons de son âge, une psy, son paternel…travaille chez un taxidermiste. Et, face à l’apparence du vivant, son rapport au réel est brouillé, déformé, trop composite. La réalisation glacifie cet état par un admirable traitement des couleurs : une palette où dominent, saturés, les verts, les rouges à côté d’autres plus délavées, excès d’attachements contre désir d’ailleurs. Seule échappatoire, un garçon délicat, de son âge, différent des autochtones, qui, trop décalé dans cet environnement, fuira ce milieu aux étroites valeurs.

La photographie est admirable : des portraits se répondent de chaque côté de l’écran, des plans moyens embrassent les deux principaux protagonistes, les isolant dans un environnement autant signifiant que leurs postures.
Difficile de se construire quand la relation à l’autre est altérée, mésentendue ainsi dans un plan de vierge à l’enfant ce dernier est son père, ou lors d’une danse, un fondu incestueux lie les deux protagonistes, le tout filmé délicatement à l’aide de dominantes colorées.
Enlisée, enferrée, pour l’héroïne, dans une telle situation où l’affectif fausse les valeurs, le sursaut est dans la fuite que lui offre une fin ouverte, mais qui laisse en suspens sa faculté à se construire sous d’autres horizons, tant son image tremblée reste incertaine. André Blasco

Loin des effets de manche et du grand spectacle, Mickey and the Bear cadre serré, dans l’intimité et la vérité d’un lien père-fille flirtant dangereusement avec la figure du couple, arrimé par la figure omniprésente de l’absente. L’écriture est pudique, la violence physique des hommes et des institutions reste souvent hors-champ, l’authenticité règne, le rythme très travaillé nous laisse surpris et longtemps habités par une fin semblant arriver promptement. Mickey and the Bear signe sans conteste une pépite du cinéma indépendant américain. Daniele Lambert
L’Interview de la réalisatrice
Dans Mickey and the bear, vous faites le portrait d’une adolescente du Montana qui a la lourde responsabilité de s’occuper de son père, un vétéran accro aux opiacés. Quand et comment avez-vous imaginé cette histoire ?
J’ai imaginé cette histoire il y a environ six ans. Je voulais aborder les thèmes de la relation entre les membres d’une même famille, ainsi que les effets du stress post-traumatique sur la vie des vétérans et leurs familles. C’est l’histoire de Mickey, qui ne rêve que de partir, et de son père Hank, veuf et traumatisé de la guerre.
Y a-t-il des similitudes entre votre adolescence et celle de Mickey Peck ?
Je dis toujours que cette histoire est très personnelle, mais pas autobiographique. Je voulais utiliser certains de mes sentiments et mes expériences de la vie réelle, afin de les dramatiser, pour qu’ils deviennent plus universels et que le film puisse parler à beaucoup de gens.
Pourquoi avez-vous choisi cette esthétique qui se rapproche de celle des années 1970 ?
William Eggleston et Stephen Shore sont deux de mes photographes américains préférés, et je voulais leur rendre hommage. Ils m’ont inspiré la palette de couleurs chaudes et plus vibrantes des années 1970, ainsi que le format panoramique (rapport 1:66).
De plus, la ville d’Anaconda (où le film a été tourné) semble résumer de nombreuses époques différentes de la culture américaine. Bien que je raconte une histoire contemporaine, je voulais que le visuel reflète non seulement l’atmosphère de la ville, mais aussi une certaine intemporalité.